13.04.14 | PUBLIC HEARING Q&A
Public: Pourquoi avez-vous choisi de filmer entièrement en gros plans?
Wilkins: Ce choix était très conscient. Un élément qui est devenu plus prévalent au fur et à mesure que je préparais le projet a été la nature de ces documents gouvernementaux qui sont transcrits : ils sont une documentation de tout ce qui est entendu, donc pour exister tu dois parler et les gens entrent dans l'existence chronologiquement, donc si on est la première personne à parler on devient la première personne à exister et le moule s'étend en quelque sorte. Le meilleur moyen d'illustrer cela était à travers des gros plans dans lesquels on construit lentement l'espace, au lieu de voir un plan large ou un plan d'ensemble. Ça m'a amené à penser à ce qu'il se passerait si je faisais un film uniquement avec des gros plans. Donc, dans un sens, le texte m'a dit comment filmer même si ce n'est qu'un rapport de ce qui est entendu.
Public: C'était un long processus de tournage… Est-ce que vous développiez le concept en même temps que vous filmiez ou vous avez commencé avec une idée précise?
Wilkins: Ça m'a pris sept ans pour faire le film à cause de problèmes de financements aux États-Unis (en fait, il n'y a pas d'argent pour les arts) mais les retards que ça a entraînés m'ont aidé à comprendre ce que ça devait être d'un point de vue formel. Je pense que si je l'avais fait dans les deux premières années quand je l'avais conçu, ça aurait été un film très différent. Par exemple, tout est filmé en 16mm et je n'avais pas assez d'argent pour transférer les enregistrements en vidéo pendant toute une année après avoir filmé, donc après les deux mois de tournage il a fallu un an avant que je voie ce que j'avais entre les mains. Cet exercice d'imaginer et de monter dans ma tête et d'essayer d'imaginer les erreurs qui pourraient survenir, comme si une bobine entière n'avait pas été exposée ou quelque chose comme ça, ça m'a vraiment aidé parce que dès que j'ai récupéré les enregistrements j'ai pu les monter très vite. Je pense que c'est la vraie valeur d'avoir tourné en 16mm, plus que la qualité d'image : ça te permet de prendre du recul et ça devient un exercice intellectuel. Le temps était mon ami, je pense.
Public: Pourquoi avez-vous utilisé la pellicule plutôt que la vidéo?
Wilkins: J'ai filmé en pellicule 16mm parce que le matériau de base est tellement public et contemporain et pour moi le défi était de convertir quelque chose de très actuel et banal en « cinéma ». Je voulais utiliser les moyens classiques du cinéma, comme le noir et blanc et les gros plans (on pense tout de suite à Joan of Arc de Theodore Dyer). Au moment où je faisais le film, il y avait incontestablement un mouvement vers la reconstitution dans le monde de l'art et c'est vraiment partout maintenant. J'étais très intéressé par la reconstitution en tant qu'outil, mais j'ai aussi pensé que c'était souvent utilisé d'une manière excessivement sérieuse dans le monde des artistes et c'était un défi intéressant pour moi de me mesurer à quelque chose qui ressemblait à un morceau d'ordure gouvernementale sans valeur. Le gouvernement était obligé de transcrire cette audience, mais on ne pensait pas que quelqu'un reviendrait dessus, et encore moins en ferait un film et dépenserait beaucoup d'argent dessus. Je n'avais pas un budget énorme, mais il y avait quelque chose de pervers et d'intéressant pour moi dans le fait de filmer dans un format qui était coûteux.
Public: Vous ne pouviez acheter aucun des matériaux dans un Walmart…
Wilkins: Tu ne pouvais pas. À part les piles. Je pense en fait que j'ai eu a acheter des piles pour l'enregistreur à Walmart à un moment donné.
Public: Qu'est-ce qui est venu en premier, l'idée formelle ou le matériau de base?
Wilkins: J'ai d'abord trouvé le matériau et j'ai ensuite décidé que ça pourrait être un film. J'étais très intéressé par les PDF à cette époque-là. J'ai beaucoup pensé à ça récemment, mais la seule manière par laquelle je n’aurais jamais pu devenir un cinéaste c'est parce que je suis un enfant de l'ère Internet. Je suis autodidacte et j'apprends tout ce que je sais sur les films via Internet et le matériau de base de la plupart de mes films vient de l'Internet. Je n'étais pas ouvertement à la recherche d'un film, mais j'étais intéressé par le fait de trouver ce genre de ready-made. Ils transcrivent l'audience, ils l'impriment, c'est notarié puis c'est scanné et téléchargé en PDF, et ensuite je peux imprimer le PDF dans la forme exacte qu'il a été entré puis en le reliant d'une certaine manière je choisi d'en faire un scénario au lieu d'un document gouvernemental. C'était une chose vraiment fascinante pour moi. J'ai trouvé d'autres transitions à ce moment-là, j'étais très intéressé par les sites web de mairies, mais la plupart n'avaient pas le meta-récit subtil sur le processus que j'ai trouvé dans ce qui est devenu le scénario de Public Hearing.
Public: Est-ce que vous êtes allé dans la ville où ça se passe, ou avez-vous essayé de savoir ce qu'il s'est passé là-bas?
Wilkins: Je suis intéressé par ce qu'il s'est passé maintenant, mais je ne l'étais pas quand j'ai fait le film. J'ai délibérément évité de rechercher les gens quand j'ai fait le film. J'ai fait l'opposé, et j'espère que le générique rend ça clair, qu'aucun des acteurs n’est nommé comme « jouant » les vraies gens. Ce sont juste des acteurs ou des interprètes, ils interprètent purement des mots qui nous appartiennent à tous (du moins aux citoyens des États-Unis). Nous avons un droit sur ce matériau. Donc d'une certaine manière je suis divorcé du sujet, mais j'ai découvert récemment que le Walmart était construit. J'ai eu récemment une projection à Union Docs à Brooklyn et les programmateurs ont essayé de contacter les vraies personnes et on leur a envoyé des lettres et une copie du film à la bibliothèque municipale, on a contacté le superviseur de la ville, mais bizarrement personne n'a répondu. Silence radio total.
Public: Avez-vous montré votre film là-bas?
Wilkins: Je ne suis pas encore allé là-bas, mais j'y pense. Je pourrais y aller avec un projecteur et une camionnette ou quelque chose comme ça. Je ne sais pas quelle est l'affaire cependant, peut-être qu'ils sont résignés ou qu'ils trouvent ça trop loin de leurs vies quotidiennes ou quoi. Je devrais dire que j'ai eu une réponse d'un type, il est professeur d'études franciscaines à l'Université de St. Bonaventure. Il a répondu de manière favorable et a demandé un DVD et il a dit qu'il ferait une projection avec ses amis puis plus de nouvelles. Il a probablement pas aimé le film.
Public: Pourquoi avez-vous choisi cette histoire particulière dans cette ville avec ce Walmart?
Wilkins: Plus que toutes les autres transcriptions que j'ai trouvées, celle-ci contient un narratif sur le processus d'une audience publique. Pour moi c'est d'une certaine manière un film politique - c'est à propos de Walmart et c'est à propos de la mondialisation, mais au bout du compte c'est à propos de l'intervention publique pour moi. Sur l'apprentissage de comment intervenir. Comme vous avez pu le voir, les modérateurs sont toujours en train de dire aux gens ce qu'ils doivent faire, si oui ou non ils sont en train de faire une entorse au règlement et j'espère que ça se reflète sur le public de cinéma qui est en train de regarder. C'est une discussion sur le protocole et le processus, mais avec une poussée narrative très subtile. C'est vraiment ressorti pour moi dans cette transcription. Aussi, j'ai grandi dans le Maine quand j'étais adolescent et il y avait cette même question - un Walmart qui avait été ouvert pendant dix ans qui avait fermé et avait été remplacé par un autre de l'autre côté de la rue- une situation absurde et superflue que j'avais expérimentée.
Public: Autre chose que vous aimeriez ajouter?
Wilkins: Merci d'être venus et merci d'avoir projeté le film.
Wilkins: Ce choix était très conscient. Un élément qui est devenu plus prévalent au fur et à mesure que je préparais le projet a été la nature de ces documents gouvernementaux qui sont transcrits : ils sont une documentation de tout ce qui est entendu, donc pour exister tu dois parler et les gens entrent dans l'existence chronologiquement, donc si on est la première personne à parler on devient la première personne à exister et le moule s'étend en quelque sorte. Le meilleur moyen d'illustrer cela était à travers des gros plans dans lesquels on construit lentement l'espace, au lieu de voir un plan large ou un plan d'ensemble. Ça m'a amené à penser à ce qu'il se passerait si je faisais un film uniquement avec des gros plans. Donc, dans un sens, le texte m'a dit comment filmer même si ce n'est qu'un rapport de ce qui est entendu.
Public: C'était un long processus de tournage… Est-ce que vous développiez le concept en même temps que vous filmiez ou vous avez commencé avec une idée précise?
Wilkins: Ça m'a pris sept ans pour faire le film à cause de problèmes de financements aux États-Unis (en fait, il n'y a pas d'argent pour les arts) mais les retards que ça a entraînés m'ont aidé à comprendre ce que ça devait être d'un point de vue formel. Je pense que si je l'avais fait dans les deux premières années quand je l'avais conçu, ça aurait été un film très différent. Par exemple, tout est filmé en 16mm et je n'avais pas assez d'argent pour transférer les enregistrements en vidéo pendant toute une année après avoir filmé, donc après les deux mois de tournage il a fallu un an avant que je voie ce que j'avais entre les mains. Cet exercice d'imaginer et de monter dans ma tête et d'essayer d'imaginer les erreurs qui pourraient survenir, comme si une bobine entière n'avait pas été exposée ou quelque chose comme ça, ça m'a vraiment aidé parce que dès que j'ai récupéré les enregistrements j'ai pu les monter très vite. Je pense que c'est la vraie valeur d'avoir tourné en 16mm, plus que la qualité d'image : ça te permet de prendre du recul et ça devient un exercice intellectuel. Le temps était mon ami, je pense.
Public: Pourquoi avez-vous utilisé la pellicule plutôt que la vidéo?
Wilkins: J'ai filmé en pellicule 16mm parce que le matériau de base est tellement public et contemporain et pour moi le défi était de convertir quelque chose de très actuel et banal en « cinéma ». Je voulais utiliser les moyens classiques du cinéma, comme le noir et blanc et les gros plans (on pense tout de suite à Joan of Arc de Theodore Dyer). Au moment où je faisais le film, il y avait incontestablement un mouvement vers la reconstitution dans le monde de l'art et c'est vraiment partout maintenant. J'étais très intéressé par la reconstitution en tant qu'outil, mais j'ai aussi pensé que c'était souvent utilisé d'une manière excessivement sérieuse dans le monde des artistes et c'était un défi intéressant pour moi de me mesurer à quelque chose qui ressemblait à un morceau d'ordure gouvernementale sans valeur. Le gouvernement était obligé de transcrire cette audience, mais on ne pensait pas que quelqu'un reviendrait dessus, et encore moins en ferait un film et dépenserait beaucoup d'argent dessus. Je n'avais pas un budget énorme, mais il y avait quelque chose de pervers et d'intéressant pour moi dans le fait de filmer dans un format qui était coûteux.
Public: Vous ne pouviez acheter aucun des matériaux dans un Walmart…
Wilkins: Tu ne pouvais pas. À part les piles. Je pense en fait que j'ai eu a acheter des piles pour l'enregistreur à Walmart à un moment donné.
Public: Qu'est-ce qui est venu en premier, l'idée formelle ou le matériau de base?
Wilkins: J'ai d'abord trouvé le matériau et j'ai ensuite décidé que ça pourrait être un film. J'étais très intéressé par les PDF à cette époque-là. J'ai beaucoup pensé à ça récemment, mais la seule manière par laquelle je n’aurais jamais pu devenir un cinéaste c'est parce que je suis un enfant de l'ère Internet. Je suis autodidacte et j'apprends tout ce que je sais sur les films via Internet et le matériau de base de la plupart de mes films vient de l'Internet. Je n'étais pas ouvertement à la recherche d'un film, mais j'étais intéressé par le fait de trouver ce genre de ready-made. Ils transcrivent l'audience, ils l'impriment, c'est notarié puis c'est scanné et téléchargé en PDF, et ensuite je peux imprimer le PDF dans la forme exacte qu'il a été entré puis en le reliant d'une certaine manière je choisi d'en faire un scénario au lieu d'un document gouvernemental. C'était une chose vraiment fascinante pour moi. J'ai trouvé d'autres transitions à ce moment-là, j'étais très intéressé par les sites web de mairies, mais la plupart n'avaient pas le meta-récit subtil sur le processus que j'ai trouvé dans ce qui est devenu le scénario de Public Hearing.
Public: Est-ce que vous êtes allé dans la ville où ça se passe, ou avez-vous essayé de savoir ce qu'il s'est passé là-bas?
Wilkins: Je suis intéressé par ce qu'il s'est passé maintenant, mais je ne l'étais pas quand j'ai fait le film. J'ai délibérément évité de rechercher les gens quand j'ai fait le film. J'ai fait l'opposé, et j'espère que le générique rend ça clair, qu'aucun des acteurs n’est nommé comme « jouant » les vraies gens. Ce sont juste des acteurs ou des interprètes, ils interprètent purement des mots qui nous appartiennent à tous (du moins aux citoyens des États-Unis). Nous avons un droit sur ce matériau. Donc d'une certaine manière je suis divorcé du sujet, mais j'ai découvert récemment que le Walmart était construit. J'ai eu récemment une projection à Union Docs à Brooklyn et les programmateurs ont essayé de contacter les vraies personnes et on leur a envoyé des lettres et une copie du film à la bibliothèque municipale, on a contacté le superviseur de la ville, mais bizarrement personne n'a répondu. Silence radio total.
Public: Avez-vous montré votre film là-bas?
Wilkins: Je ne suis pas encore allé là-bas, mais j'y pense. Je pourrais y aller avec un projecteur et une camionnette ou quelque chose comme ça. Je ne sais pas quelle est l'affaire cependant, peut-être qu'ils sont résignés ou qu'ils trouvent ça trop loin de leurs vies quotidiennes ou quoi. Je devrais dire que j'ai eu une réponse d'un type, il est professeur d'études franciscaines à l'Université de St. Bonaventure. Il a répondu de manière favorable et a demandé un DVD et il a dit qu'il ferait une projection avec ses amis puis plus de nouvelles. Il a probablement pas aimé le film.
Public: Pourquoi avez-vous choisi cette histoire particulière dans cette ville avec ce Walmart?
Wilkins: Plus que toutes les autres transcriptions que j'ai trouvées, celle-ci contient un narratif sur le processus d'une audience publique. Pour moi c'est d'une certaine manière un film politique - c'est à propos de Walmart et c'est à propos de la mondialisation, mais au bout du compte c'est à propos de l'intervention publique pour moi. Sur l'apprentissage de comment intervenir. Comme vous avez pu le voir, les modérateurs sont toujours en train de dire aux gens ce qu'ils doivent faire, si oui ou non ils sont en train de faire une entorse au règlement et j'espère que ça se reflète sur le public de cinéma qui est en train de regarder. C'est une discussion sur le protocole et le processus, mais avec une poussée narrative très subtile. C'est vraiment ressorti pour moi dans cette transcription. Aussi, j'ai grandi dans le Maine quand j'étais adolescent et il y avait cette même question - un Walmart qui avait été ouvert pendant dix ans qui avait fermé et avait été remplacé par un autre de l'autre côté de la rue- une situation absurde et superflue que j'avais expérimentée.
Public: Autre chose que vous aimeriez ajouter?
Wilkins: Merci d'être venus et merci d'avoir projeté le film.